Les vacanciers de Marrakech (Michel Houellebecq)
(…) « Certes ! s'était-il exclamé avec emphase, il y a là un impressionnant assemblage de pierrailles… Mais de là à conclure à l'existence d'un Dieu unique !... »
Cet homme, intelligent et souvent drôle, semblait s'être pris d'affection pour moi, sans doute parce que j'étais le seul Français du groupe, et que, pour d'obscure raisons culturelles et sentimentales, il nourrissait une ancienne passion à vrai dire devenue surtout théorique pour la France.
En m'adressant la parole, il avait littéralement sauvé mes vacances. Âgé d'une cinquantaine d'années, toujours impeccablement vêtu, très basané, il portait une petite moustache. Biochimiste de formation, il avait émigré en Angleterre dès la fin de ses études, et y avait brillamment réussi dans le domaine de l'ingénierie génétique. En visite dans son pays natal, pour lequel il affirmait garder une affection intacte, il n'avait par contre pas de mots assez durs pour stigmatiser l'islam. Les Egyptiens n'étaient pas des Arabes, il tenait avant tout à m'en persuader. »
Quand je pense que ce pays a tout inventé !... s'exclamait-il en désignant d'un geste large la vallée du Nil. L'architecture, l'astronomie, les mathématiques, l'agriculture, la médecine…(il exagérait un peu, mais c'était un Oriental, et il avait besoin de me persuader rapidement).. Depuis l'apparition de l'Islam, plus rien. Le néant intellectuel absolu, le vide total. Nous sommes devenus un pays de mendiants pouilleux. Des mendiants pleins de poux, voilà ce que nous sommes. Racaille, racaille !... (il chassa d'un geste rageur quelques gamins venus quémander des piécettes)...
...Il faut vous souvenir, cher monsieur (il parlait couramment cinq langues étrangères : le français, l'allemand, l'anglais, l'espagnol et le russe), que l'islam est né en plein désert, au milieu de scorpions, de chameaux et d'animaux féroces de toutes espèces. Savez-vous comment j'appelle les musulmans ? Les minables du Sahara. Voilà le seul nom qu'ils méritent. Croyez-vous que l'Islam aurait pu naître dans une vallée aussi splendide ? (il désigna de nouveau la vallée du Nil, avec une émotion réelle). Non, monsieur. L'islam ne pouvait naître que dans un désert stupide, au milieu de bédouins crasseux qui n'avaient rien d'autre à faire – pardonnez-moi – que d'enculer leurs chameaux. Plus une religion s'approche du Monothéisme – songez-y bien, cher monsieur -, plus elle est inhumaine et cruelle ; et l'islam est, de toutes les religions, celle qui impose le monothéisme le plus radical. Dès sa naissance, il se signale par une succession ininterrompue de guerres d'invasion et de massacres ; jamais, tant qu'il existera, la concorde ne pourra régner sur le monde. Jamais non plus, en terre musulmane, l'intelligence et le talent ne pourront trouver leur place ; s'il y a eu des mathématiciens, des poètes, des savants arabes, c'est tout simplement parce qu'ils avaient perdu la foi.
A la lecture du Coran, déjà, on ne peut manquer d'être frappé par la regrettable ambiance de tautologie qui caractérise l'ouvrage : « Il n'y a d'autre Dieu que Dieu seul », etc. Avec ça, convenez-en, on ne peut aller bien loin. Loin d'être un effort d'abstraction, comme on le prétend parfois, le passage au monothéisme n'est qu'un élan vers l'abrutissement.
(…)Un dieu unique ! Quelle absurdité inhumaine et meurtrière !... Un dieu de pierre, cher monsieur, un dieu sanglant et jaloux qui n'aurait jamais dû dépasser les frontières du Sinaï. Comme notre religion égyptienne, lorsqu'on y songe, était plus profonde, plus humaine et plus sage… Et nos femmes ! Comme elles étaient belles ! Souvenez-vous de Cléopâtre, qui envoûta le grand César. Regardez ce qu'il en reste aujourd'hui…(il désigna au hasard deux femmes voilée qui progressaient péniblement en portant des ballots de marchandises). Des tas. Des gros tas de graisse informes qui se dissimulent sous des torchons. Dès qu'elles sont mariées, elles ne pensent plus qu'à manger. Elles bouffent, elles bouffent !... (son visage se gonfla dans une mimique expressive à la de Funès).
Non, croyez-moi, cher monsieur, le désert ne produit que des désaxés et des crétins. Dans votre culture occidentale, que j'admire d'ailleurs, que je respecte, pouvez-vous me citer ceux qui ont été attirés par le désert ? Uniquement des pédérastes, des aventuriers et des crapules. Comme ce ridicule colonel Lawrence, homosexuel décadent. Comme votre abject Henry de Monfreid, prêt à toutes les compromissions, trafiquant sans scrupules. Rien de grand ni de noble, rien de généreux ni de sain ; rien qui puisse faire progresser l'humanité, ni l'élever au-dessus d'elle-même. »
[Extrait de « Plateforme » de Michel Houellebecq]
Injure raciale : jugement attendu dans le procès Houellebecq
Le tribunal correctionnel de Paris rend aujourd'hui son jugement à l'encontre de l'écrivain Michel Houellebecq, poursuivi pour injure raciale et incitation à la haine religieuse.
Le 17 septembre dernier, le parquet avait requis la relaxe pour Michel Houellebecq. A la barre, l'auteur avait nié toute aversion contre les Musulmans mais avait revendiqué son "mépris pour l'Islam". C'est une interview au magazine littéraire "Lire", en septembre 2001, qui vaut aujourd'hui à Houellebecq d'être poursuivi, à la demande des grandes mosquées de Paris et de Lyon et de la Ligue des droits de l'Homme. "La religion la plus con, c'est quand même l'Islam", avait notamment estimé le polémiste, dans un entretien consécutif à la sortie de son roman "Plateforme". "Effondré" par la lecture du Coran, il qualifiait l'Islam de "religion dangereuse, et ce depuis son apparition".
Au terme d'une audience débordant bien souvent des limites de la procédure, devant la 17ème chambre correctionnelle, la procureure Béatrice Angelelli s'était attachée à recadrer la question autour du droit. "On peut dire que (les propos de Houellebecq) sont des jugements à l'emporte-pièce. Peut-être est-il provocateur. Mais nous ne sommes pas là pour dire ou faire la morale mais pour sanctionner une responsabilité pénale", avait-elle estimé, avant de demander la "relaxe" de l'écrivain et du magazine Lire. L'auteur, 44 ans, était apparu tel qu'en lui-même, emprunté, maladroit. Mais diablement efficace avec les mots : "autant mettre des points-virgules, je le fais mieux que quiconque dans la littérature française, autant me demander un avis d'ordre général, quand on me connaît, c'est presque absurde", avait-il expliqué.
"Une religion qui m'apparaît comme stupide"
Houellebecq avait, en quelque sorte, revendiqué un droit à l'incohérence dans ses propos publics, sans choisir réellement entre humour grinçant et cynisme, imprécation et provocation. "Tout le ton général de l'entretien, c'était du mépris, pas de la haine", avait-il précisé. Une méthode manifestement peu appréciée de ses contradicteurs. "Vous prenez les musulmans pour des cons ?", demandait un avocat des parties civiles. "Je n'ai jamais dit ça. J'ai dit qu'ils suivaient une religion qui m'apparaît stupide", répondait l'écrivain. Et Houellebecq d'en rajouter, dans un étrange détachement : "il existe un discours convenu qui consiste à dire que les textes fondamentaux ne prêchent que la paix. Mais dans la réalité, les textes monothéistes ne prêchent ni la paix, ni l'amour, ni la tolérance : ce sont des textes de haine".
>>> Michel Houellebecq relaxé!
Le jugement a été rendu le 22 octobre 2002 et constitue une grande victoire pour la laïcité et la liberté d'expression: l'écrivain a été relaxé! Le tribunal de Paris a estimé que ses propos très critiques à l'égard de l'islam ne constituaient pas une insulte envers les musulmans, un groupe de croyants n'étant pas assimilable à la religion à laquelle ils croient.
Odal GOLD